Qu’est-ce qu’une glacière naturelle?
« On sait qu’il suffit d’enfouir de la glace à une certaine profondeur, dans ces espèces de caves ou de puits larges que l’on appelle glacières, recouvertes de substances qui se laissent difficilement pénétrer par la chaleur (paille ou chaume), pour conserver cette glace jusqu’au milieu des plus grandes chaleurs de l’été. Ajoutons à cela une entrée tournée au nord. »
Extrait du Magasin pittoresque (1855) « glacières naturelles »
Une nouvelle construction qui doit s’édifier sur les hauteurs de Châtillon à l’emplacement du Café « La Tour Biret » me donne l’occasion de vous rouvrir cette page de notre histoire châtillonnaise.
La glacière du sieur Raffard, officier du gobelet de la reine
Il semble qu’elle ait été construite par un certain Raffard, peut-être vers 1750-1760.
C’était une glacière recouverte par une butte importante comme en témoigne le Duc de Crouy dans son journal :
« Le 1 er septembre 1763 j’allais à cheval à Châtillon. J’avais fait avertir le maçon qui, avec des échelles, me fit monter au haut de la glacière. Je trouvai la vue parfaite, peut-être la plus belle des environs de Paris. Je vis qu’on était à la hauteur des toits de Meudon, aussi il valait la peine de profiter de la butte de la nouvelle glacière. J’appris que le bourgeois (c’est ainsi qu’auprès de Paris on appelle tout propriétaire) était M. Raffard, officier du Gobelet de la Reine. J’allais chez lui, dans Châtillon, je trouvai un homme accommodant qui avait un très beau jardin et deux autres glacières. Je le menai sur le haut et nous convînmes que j’y ferai faire une plate-forme ronde ».
Le Duc de Crouy y fit en effet construire une tour, dont la solidité ne fut pas très grande puisque quelques années après il dut y faire des travaux importants. C’était la tour dite de Crouy qui tomba plus tard en ruines. Elle fut définitivement abattue lors de la guerre de 1870. Cependant la glacière demeura et fut utilisée comme dépôt de glace jusqu’en 1886 par la Société des Glacières de Paris.
La tour Biret
La butte fut ensuite aplanie et M. Biret fit construire au-dessus de la cavité restante, en 1893, sa célèbre tour aux distractions. Cette glacière était alimentée en glace par deux étangs appartenant d’ailleurs à M. Raffard, étangs disparus après la guerre de 1870.
La rue des Étangs en rappelle le souvenir. Ils étaient situés à peu de distance de la glacière, de l’autre côté de l’avenue de la Division Leclerc actuelle, autrefois route de Chevreuse.
M. Raffard avait une maison, qui existe encore, au coin, des actuelles rue de Fontenay et rue Gambetta. Côté intérieur se trouvaient deux glacières, mais beaucoup plus petites que celle sur laquelle le Duc de Crouy avait édifié sa tour. Il est possible que ces dernières aient été alimentées, au moins en partie, à partir de celle du plateau.
En outre il est vraisemblable que ces deux dernières glacières avaient une couverture légère du type charpente en bois avec chaume. Voilà pour les glacières dont on est sûr de l’existence.
Existence d’autres glacières?
Y en avait-il d’autres ? Les grandes propriétés en étaient assez souvent pourvues. Il serait donc possible que dans les quatre grandes propriétés existantes, la Folie Desmares, la maison Regnaut, la maison de la Comtesse de Tessé y compris la maison du Cèdre, et la maison de Monsieur de Lambon (son jardin est devenu le parc municipal), des glacières y aient été construites.
Cependant nous ne possédons aucun document le confirmant. Mais sur les quelques plans anciens existants, certaines représentations ne peuvent être traduites comme de telles constructions.
En outre le grand développement des glacières démarre surtout à partir de 1750. Or, ces propriétés sont plus anciennes.
On peut penser que le fournisseur principal de glace à rafraîchir était peut-être M. Raffard. De la grande glacière du plateau, il reste un dessin de la tour de Crouy du XIX e siècle sur lequel on voit très bien la butte qui couvrait la cavité souterraine. Cette dernière subsiste encore et constitue la cave circulaire, d’un diamètre d’environ 8 mètres, de l’ancien café, dit de « la tour Biret »
Trait de mémoire – Châtillon infos – n° 302 – Janvier/Février 2017